Phalaenopsis
tetraspis (Rchb.f 1870)
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Etymologie
assez obscure
du Grec tetra, quatre et aspes,
bouclier arrondi
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Origine : Indes (îles Andaman et Nicobar), Sumatra
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Descriptions originales ici |
Synonymes principaux
Phalaenopsis
barrii (King 1895)
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Phalaenopsis
speciosa var.tetraspis (Sweet
1968)
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Phalaenopsis
sumatrana var.alba (G.Wilson 1915)
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Description |
Plante
épiphyte ou litophyte à racines nombreuses, charnues.
Tige courte, complètement recouverte par l'imbrication de
la base des feuilles.
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Feuilles
charnues, elliptiques ou obovales-elliptiques, à apex aigu
ou obtus, rétrécies à la base, longues de 20
cm. ou plus, larges de 6 à 8 cm. Au nombre de 4/5, voire jusqu'à
9 sur des individus bien développés.
Pédoncule
sortant très bas sur la tige, entre les bases desséchées
des anciennes feuilles, arqué ou pendant, simple ou branchu,
portant de nombreuses fleurs, plus long que le feuillage, persistant
plusieurs années. Bractées courtes, triangulaires, acuminées,
cucullées, de 5 à 7 mm.
Fleur
charnue de 5 à 6 cm, étoilée, à coloration
très variable, délicatement parfumée. Sépales
oblongs-elliptiques à obovales-elliptiques, aigus ou obtus.
Pétales identiques aux sépales mais légèrement
plus courts. Sépales et pétales plus ou moins concaves.
Labelle
1/3 plus court que les pétales, trilobé, à base
très étroite, courtement pédicellé. Lobes
latéraux triangulaires, à extrémité falciforme
orné d'un crochet retourné, plus ou moins dentelée,
avec un callus aplati en leur milieu. Lobe médian oblong, charnu,
convexe, avec une haute carène centrale dentelée, terminée
par un callus aplati, densément couvert de poils courts. Disque
entre les lobes latéraux orné d'un simple callus bifide,
court, quelquefois avec des protubérances additionnelles. A
la jonction des lobes latéraux et du lobe médian il
y a un second callus également bifide mais plus allongé.
Colonne
charnue, érigée, de 8 mm. Clinandre très développé,
comme entouré d'un capuchon, légèrement denticulé.
Pédicelle
de 2 à 3 cm. |
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Ci-dessous, dessin de
sweet réalisés d'après les échantillons
d'herbier originaux réhydratés. Lorsque l'on étudie
des fleurs fraîches, de phalaenopsis tetraspis, la corne située
à l'extrémité des lobes latéraux du
labelle n'apparaissent pas.
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Détails
du labelle de Phalaenopsis tetraspis |
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Labelle d'une fleur fraîche
de Phalaenopsis tetraspis-Dessin de Frédéric Kirsch-
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Observations
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Fleur blanche ou blanchâtre avec des
suffusions vertes, essentiellement prés des extrémités
des segments. Segments parfois plus ou moins largement maculés
de rose, de rose violacé, de saumon ou de pourpre. les sépales
et les pétales peuvent être plus ou moins barrés ou
mouchetés de brun clair. Ils sont parfois uniformément blancs.
Colonne blanche. Base du lobe médian partiellement veiné
de violet.
Fleurs plus ou moins agréablement
parfumées.
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Phalaenopsis
speciosa versus Phalaenopsis tetraspis
Phalaenopsis
tetraspis Rchb.f. et Phalaenopsis speciosa Rchb.f. ont été
considérés comme appartenant à des espèces
distinctes. Elles ont toutes deux disparues des cultures au début
du XXème et étaient seulement connues par des échantillons
d'herbier et quelques lithographies jusqu'à la redécouverte
et à la réintroduction en culture de Phalaenopsis tetraspis
au début des années 1990. L'apparition quelques années
plus tard de plantes de Phalaenopsis tetraspis aux sépales
ou aux pétales plus ou moins régulièrement tachés
de violet amène à s'interroger sur la similitude de
ces formes de Phalaenopsis tetraspis avec Phalaenopsis speciosa et
à la possibilité de considérer ces deux espèces
conspécifiques.
Phalaenopsis
tetraspis et Phalaenopsis speciosa ont été simultanément
introduits en culture en Angleterre en 1881 et l'on peut faire remonter
la controverse concernant leur conspécificité dès
l'année suivante. Le premier à avoir noté la
très grande ressemblance entre ces deux espèces a été
Thomas Moore, botaniste et horticulteur anglais, dans un article du
Gardener's Chronicle concernant les plantes nouvelles introduites
en culture en Angleterre en 1882. Il fut suivi en 1883 par le botaniste
belge André Pascal Alexandre De Vos dans la Belgique Horticole.
Joseph
Dalton Hooker en 1890 dans The Flora of British India
puis en 1893 dans Curtis's Botanical Magazine, Robert
Allen Rolfe en 1894 dans Orchid Review notent des ressemblances
entre les deux espèces. Hooker va plus loin en 1895 dans A
Century of Indian Orchids, en suggérant que Phalaenopsis
tetraspis puisse être une forme de Phalaenopsis speciosa rejoint
en cela trois quarts de siècle plus tard par Herman
Royden Sweet qui fut le premier botaniste du XXème
siècle à s'intéresser à la classification
du genre Phalaenopsis en 1968.
C'est Heinrich
Gustav Reichenbach qui décrivit les deux espèces;
d'abord Phalaenopsis tetraspis en 1870 à partir de fleurs séchées
collectées par Thomas Lobb
collecteur pour les établissements
Veitch (Lobb ayant cessé de travailler pour Veitch
en 1860, ces exemplaires avaient donc été récoltés
depuis au moins 10 ans mais Reichenbach les jugeait en bon état
de conservation) puis Phalaenopsis speciosa en 1881, également
à partir de fleurs sèches et en ayant à sa disposition
un dessin (ci-contre) de la main du Major General Emeric Streatfield
Berkeley
qui est à l'origine de l'introduction de ces deux espèces
vivantes en Europe à partir des îles Andaman. Il ramena
des plantes à William
Bull. |
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Reichenbach qui a décrit et nommé
ces plantes admettait la proximité des deux espèces et dût
lui-même argumenter dans les colonnes du Gardener's Chronicle
pour défendre la ségrégation entre les deux espèces.
Pour lui les disparités sont multiples ; époque de floraison,
couleur des feuilles (vert foncé et épaisses chez Phalaenopsis
tetraspis, presque jaunâtres et fines chez Phalaenopsis speciosa),
nombre et forme des racines (moins nombreuses et plus aplaties chez Phalaenopsis
speciosa), floribondité plus généreuse pour Phalaenopsis
speciosa, mais il admet que la plus grande différence vient de
la coloration des fleurs. Dans le même journal Berkeley qui défendait
la même thèse que Reichenbach notait quelques différences
entre les deux espèces; pour lui " Phalaenopsis speciosa est
plus robuste et demande plus de lumière car on le trouve sur de
grands arbres bien exposé. Phalaenopsis tetraspis qui pousse dans
la mangrove est moins exigeant ". L'ensemble de cet argumentaire
ne suffit pas à discriminer deux espèces et les quelques
remarques que l'on peut lire dans la littérature contemporaine
de Reichenbach et de Berkeley viennent contredire leurs commentaires.
Malgré ce que dit Reichenbach, l'époque de floraison des
plantes de ces deux espèces est identique ; elles sont souvent
présentées en même temps lors des expositions horticoles
qui ont lieu régulièrement en Angleterre à cette
époque et les comptes rendus de ces expositions vont aussi à
l'encontre de ce que le botaniste allemand affirme quant à la différence
de floribondité.
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Annals
of the Royal Botanic Garden
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Orchid Album
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Reichenbachia
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Les
représentations de Phalaenopsis speciosa dans The Orchid Album
en 1885 puis en 1888 dans Reichenbachia sont des vues d'artiste
et montrent des plantes portant respectivement 5 et 4 fleurs. Le dessin
de John Day
réalisé au mois de juin 1883, exact et détaillé
du point de vue botanique, ne montre qu'une tige portant trois fleurs.
Dans le même temps, la représentation de Phalaenopsis tetraspis
dans The Botanical Magazine en 1893 montre une plante qui porte
deux fleurs ce qui est aussi le cas de la plante représentée
dans Annals of the Royal Botanic Garden, Calcutta en 1895, mais
on signale une plante portant six fleurs sur la même tige florale
en 1894 à Kew et les plantes adultes maintenant en culture portent
souvent une quantité de fleurs supérieure.
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Détails du dessin
de John Day. Remarquer la coloration irrégulière des
segments.
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Cette différence de floribondité
s'explique simplement par la taille respectives des plantes représentées
ou exposées, Berkeley présentant Phalaenopsis speciosa comme
plus robuste que Phalaenopsis tetraspis on peut donc s'attendre à
ce que les plantes de cette dernière espèce aient demandé
plus de temps pour arriver à complète maturité. La
coloration des feuilles et la forme des racines ne sont pas non plus des
arguments suffisants ; la coloration des feuilles varie considérablement
en fonction de l'environnement et le nombre et la forme des racines dépendent
du développement de la plante et la présence ou de l'absence
d'un support.
Toujours au XIXème siècle, dans leur manuel respectif, Lucien
Linden et Harry
James Veitch traitent ces deux espèces séparément
sans les rapprocher. Veitch note que chez Phalaenopsis tetraspis : "
les tiges florales sont plus courtes que le feuillage et portent de 3
à 5 fleurs". Ceci n'est vrai que lorsque les plantes sont
jeunes, les tiges florales deviennent beaucoup plus longues et portent
plus de fleurs lorsque les plantes sont adultes. Pour Veitch encore, les
tiges florales de Phalaenopsis speciosa sont : " plus longues que
le feuillage, quelquefois ramifiées et portant de 9 à 12
fleurs, voire plus ". Un peu plus tard, en 1915, Rudolf
Schlechter rapproche aussi Phalaenopsis tetraspis de Phalaenopsis
speciosa mais note que le lobe médian de ce dernier est de couleur
améthyste alors que celui de Phalaenopsis tetraspis est blanc veiné
de rouge. Cette remarque concernant la couleur du lobe médian est
un argument récurrent pour les partisans de la séparation
des deux espèces mais Reichenbach lui-même a écrit
que le labelle de Phalaenopsis speciosa était : " blanc, strié
de mauve ", donc identique aux couleurs du lobe médian de
Phalaenopsis tetraspis. D'une manière générale, l'argument
de la couleur de la fleur ne peut être retenu pour discriminer une
espèce.
En 1968, après avoir étudié et comparé les
deux espèces Sweet ramène Phalaenopsis tetraspis au rang
de variété de Phalaenopsis speciosa en précisant
que pour lui Phalaenopsis tetraspis n'est qu'une forme albinos de Phalaenopsis
speciosa. Les dessins qu'il propose pour illustrer les labelles, dessins
réalisés d'après les échantillons d'herbier
originaux ayant servi à la description des deux espèces,
permettent de remarquer immédiatement la très grande similitude
qui existe entre les labelles de Phalaenopsis tetraspis et de Phalaenopsis
speciosa. A part une forme générale légèrement
différente les dessins comparatifs des labelles des deux espèces
montrent essentiellement que les lobes latéraux de Phalaenopsis
tetraspis se terminent par une sorte de crochet que je n'ai personnellement
jamais réussi à observer et qui n'apparaît pas dans
le dessin original de Reichenbach. D'autres différences mineures
comme la forme du lobe médian plus oblong, un trichome plus allongé
et un cal aux divergences presque parallèles chez Phalaenopsis
tetraspis, ne sont pas des arguments décisifs pour différencier
deux espèces. Ces différences mineures sont observables
chez d'autres espèces et l'observation d'échantillons secs
peut expliquer ces quelques dissemblances.
En 2001, Eric Alston Christenson dans Phalaenopsis A Monograph,
admet que Phalaenopsis speciosa pose un problème à cause
de sa coloration très versatile et qu'il se rapproche en cela de
Phalaenopsis tetraspis qui montre également une certaine variabilité
dans sa coloration. Il remarque également que ces deux espèces
sont sympatriques bien que Phalaenopsis tetraspis est une aire de dispersion
plus étendue.
La comparaison des fleurs des plantes actuellement en culture avec les
dessins connus de Phalaenopsis speciosa ne permet pas non plus de discerner
de différences. Comme Sweet l'affirmait dès 1968 après
examen des lobes médian de ces deux espèces on ne peut que
constater que l'on a à faire à des espèces conspécifiques
mais qu'il convient de ramener Phalaenopsis speciosa Rchb.f. au rang de
synonyme de Phalaenopsis tetraspis Rchb.f., cette dernière espèce
bénéficiant de l'antériorité. On ne peut considérer
Phalaenopsis speciosa comme subvariété de Phalaenopsis tetraspis
malgré que cette espèce soit endémique des îles
Andaman mais l'absence d'homogénéité des plantes
obtenues par semis va à l'encontre de cette classification.
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La nouvelle combinaison devrait être
:
Phalaenopsis tetraspis Rchb.f., Xenia Orchidacea
2: 146 (1870).
Synonymes
Phalaenopsis speciosa Rchb.f., 1881.
Phalaenopsis speciosa var. christiana E.S.Berk.,
1882.
Phalaenopsis speciosa var. imperatrix E.S.Berk.,
1882.
Phalaenopsis speciosa var. purpurata Hook.,
1890.
Phalaenopsis imperati Gower,
1890.
Phalaenopsis speciosa subvar. christiana
(E.S.Berk.) A.H.
Kent 1891.
Phalaenopsis speciosa subvar. imperatrix
(E.S.Berk.) A.H.Kent 1891.
Phalaenopsis barrtii King ex Hook.f., 1895,
nom. inval.
Phalaenopsis speciosa var. maculata Gower,
1890.
Phalaenopsis sumatrana var. alba (Korth.
& Rchb.f.) G. Wilson, 1915.
Phalaenopsis speciosa var. tetraspis (Rchb.f.)
Sweet, 1968.
Polychilos speciosa (Rchb.f.) Shim, 1982.
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Dessin du premier Phalaenopsis
tetraspis ayant fleuri dans une serre européenne (John Day)
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La pratique horticole conduit
à distinguer:
Phalaenopsis tetraspis, sépales
et pétales blanc, lobe médian du labelle souligné
de mauve.
Phalaenopsis tetraspis f. maculata sépales
et pétales blanc plus ou moins tachés de brun/rose,
lobe médian du labelle souligné de mauve
P tetraspis f. alba, sépales
et pétales blancs, lobe médian du labelle blanc.
Phalaenopsis tetraspis f. speciosa,
sépales et pétales blancs plus ou moins maculés
de mauve/rouge ou de saumon.
Phalaenopsis tetraspis f. christiana,
sépales mauve/rouge ou saumon, pétales blancs.
Phalaenopsis tetraspis f. impératrix,
sépales et pétales complétement maculés
de mauve/rouge, lobe médian du labelle mauve/rouge. |
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Détails du labelle
(John Day)
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Au premier trimestre
2018, Phalaenopsis speciosa est considéré comme synonyme
de Phalaenopsis tetraspis par Kew.
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Historique
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Berkeley a aussi envoyé
en Europe des plantes collectée sur les îles Andaman.
Il écrivait en 1893 dans l'Orchid Review que les plus
grandes plantes ne supportaient pas le voyage et que seules les plus petites
arrivaient vivantes en Angleterre. Il décrit une plante exceptionnelle
qu'il a lui-même observée, avec des feuilles de près
de 90 cm de long. Cette plante avait produit des keikis qui eux-mêmes
en avaient produit d'autres, ce qui faisait qu'au moment de la floraison,
plante-mère, plantes filles et plantes-petites-filles produisaient
conjointement une profusion de fleurs. Il estime à une centaine
le nombre de tiges fleurissant conjointement. Cette plante poussait sur
la mangrove, au-dessus d'une eau non saumâtre, constamment dans
des conditions d'humidité très élevées. D'autres
sujets croissaient sur les rochers, toujours assez éloignées
de la mer, cette espèce ne semblant pas supporter les embruns comme
certaines autres.
D'autres voyageurs font également des descriptions de cette plante
comme se plaisant dans les mangroves.
Maurice
Vacherot le cite dans son ouvrage Les Orchidees de 1957
comme proche de Phalaenopsis sumatrana, mais avec des fleurs blanc d'ivoire
immaculé et le lobe médian du labelle portant une dense
touffe de poils.
Phalaenopsis speciosa est cité comme hybride naturel entre Phalaenopsis
lueddemanniana et Phalaenopsis tetraspis dans le Gardener's Chronicle
du 4 avril 1896, mais sans autre référence.
Si ces plantes sont restées longtemps ignorées des collectionneurs
du monde entier, elles ne sont pas restées inconnues de certains
botanistes en mission sur l'île de la Grande Nicobar dans la forêt
de laful au début des années 1980 puis en 2002. Pour en
savoir plus consultez ces liens, deux articles parus dans Ricardiana en
2014 :
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https://www.researchgate.net/publication/310458642_A_Review_of_the_Orchid_Diversity_of_Andaman_Nicobar_Islands_India |
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Phalaenopsis tetraspis dans
Botanical Magazine, 1893
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Hybride de Phalaenopsis
tetraspis par Phalaenopsis Miva Brick
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Evolution moyenne des températures,
de la pluviométrie et de l'humidité relative aux îles
Nicobar, niveau de la mer
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